Les idées reçues autour de l'alimentation responsable

12 janvier 2024 | Décryptage Les idées reçues autour de l'alimentation responsable

Le bio est-il vraiment la référence pour consommer plus responsable ? On décrypte les idées reçues autour de l'alimentation durable.

Consommer responsable devient parfois un vrai casse-tête ! Entre tous les modes de consommation durable, le bio est considéré comme LA référence d’une alimentation plus responsable. Mais est-il suffisant? Et faut-il le préférer au local ? Ou plutôt privilégier le bio, mais qui vient d’un peu loin ? Pour vous aider à y voir plus clair, on déconstruit les idées reçues autour de l’alimentation responsable.  

Idée reçue numéro 1 : “Le bio c’est bien, mais il vaut mieux consommer local” 

Ça semble logique : transporter des aliments de loin, ça pollue. Surtout qu’au niveau mondial les transports représentent 28% de nos émissions.  

Mais à l’échelle de l’alimentation, le transport pèse peu dans la balance environnementale : il ne représente que 13,5% des émissions du secteur, quand les modes de production en représentent 70%. C’est principalement l’élevage de bovins et la consommation issue des engins agricoles qui sont responsables des émissions. 

Ces chiffres sont en décalage avec l’idée selon laquelle il vaut mieux manger local que bio. Le mieux étant toutefois de combiner les deux.

 

 

Zoom sur le label bio 

Dans l’alimentation bio, on distingue deux labels : le label AB et le label européen. 

  • Le label AB

Crée en 1985, le label AB est un label français qui obéit à un cahier des charges strict. Il impose une rotation des cultures, et l’interdiction d’utiliser des pesticides de synthèse ou des OGM. Pour les produits d’origine animal, il est obligatoire de nourrir les animaux avec une alimentation bio, de limiter les traitements antibiotiques, et de ne pas les élever hors sol.  

  • Le label européen 

Aussi appelé “eurofeuille”, il assure le respect du cahier des charges de l’alimentation biologique au sein de l’Union Européenne. Ce logo doit être obligatoirement accompagné d’une mention de l’origine des produits, mais qui reste souvent floue. La prochaine fois que vous faites vos courses, regardez l'étiquette d'un pot de miel industriel, on y distingue la mention “Origine UE et non UE”. Ce qui ne veut à peu près rien dire. Depuis 2010, le label AB et le label eurofeuille recouvrent les mêmes critères de production. 

Comment se porte le secteur du bio ?  

En 2022, le secteur du bio connaît une baisse, de 4,6% par rapport à 2021. Elle s’inscrit dans un contexte général de réduction de la consommation : selon l’INSEE, les Français consacrent une part de plus en plus réduite de leur budget à l’alimentation, passée de 29% en 1960 à seulement 19% en 2019.  

Malgré cela, le marché du bio est tout de même porté par des tendances de fonds favorables :  

  • La part croissante des achats alimentaires en ligne : qui représentent 9% du chiffre d’affaires des produits de grande consommation et de produits frais en France en 2021. 
  • L’intérêt croissant des consommateurs pour la livraison à domicile : +49% en 2022 (étude Kantar) et qui permet à de nouveaux acteurs du bio comme La Fourche, d’émerger au sein du secteur. 

Le marché du bio se structure aussi autour d’acteurs comme Pour Demain, qui aide les agriculteurs à se convertir au bio et commercialisent ensuite leurs produits labellisés bio. 

Idée reçue numéro 2 : "Oui, mais le bio ça reste beaucoup plus cher"

Si on ne parle que du prix à la caisse, c’est vrai : le bio est environ 20 à 30% plus cher que les produits en agriculture conventionnelle. 

L’alimentation bio nécessite une transition alimentaire plus profonde, qui permet au final d’amortir les coûts. En achetant plus de produits moins transformés, moins de viande, ou en gaspillant moins, on finit par réduire son budget alimentation. 

De fait, si les produits issus de l’agriculture conventionnelle sont moins chers, ils comportent aussi des coûts cachés. Selon une étude publiée en 2022, et révélée par le journal le Monde, les coûts des pesticides s’élèveraient à 370 millions d’euros par an en France. 

Cela concerne des atteintes à l’environnement, comme les surcoûts engendrés par le traitement des eaux polluées, ou les soins apportés aux maladies liées aux pesticides.

Idée reçue numéro 3 : “Le circuit-court c’est bien car c’est local” 

Attention, circuit-court ne veut pas dire forcément local : on peut acheter du vin bio en vente directe, mais à un producteur argentin. 

Un produit est dit vendu en circuit court, lorsqu’il y a maximum un intermédiaire entre le producteur et le consommateur, mais sa définition ne prévoit pas de mention géographique sur la proximité. 

De même qu’il n’y a pas de définition stricte du “local”. Si consommer local permet de soutenir l’économie des territoires, la proximité géographique n’est pas fixée et les informations sur la manière dont les produits locaux sont élaborés ne sont pas obligatoires. Il y a évidemment des systèmes vertueux qui permettent de rapprocher producteurs et consommateurs, comme les AMAP ou encore les réseaux comme la Ruche qui dit Oui, ou Kelbongoo. Ces systèmes privilégient des produits locaux, en circuit-court, et le plus souvent bio.

Idée reçue numéro 4 : “Le bio c’est forcément bon pour la planète” 

L’agriculture biologique peut elle aussi avoir ses limites : consommer des produits bio mais transportés en avion, ce n’est pas ce qu’il y a de plus vertueux ! De même pour la consommation de tomates bio mais produites hors saison en hiver, à l’aide de serres chauffées.  

Selon l'Ademe, une tonne de tomates cultivées sous serre chauffée consomme 2 360 kg de CO2. Par comparaison, une tonne de tomates cultivées en saison et sans serre chauffée ne consomme que 160 kg de CO2, soit 15 fois moins. 

biocoop

Une publicité de la chaîne de magasins bio "Biocoop"

Les modèles qui vont au-delà de l’agriculture biologique

Si l’agriculture biologique, est à la base d’une alimentation plus responsable, il existe d’autres modes d’agriculture qui pourraient permettre de révolutionner totalement notre système alimentaire. 

En commençant par l’agroécologie, un mode de production qui révise en profondeur les systèmes agricoles actuels, en se basant sur les fonctionnalités déjà offertes par nos écosystèmes. L'objectif étant d’utiliser la nature comme un facteur de production et de limiter l’utilisation de produits externes. De nombreux acteurs de l’agro-écologie tentent de se structurer en filière, et montrent que ce modèle agricole est possible à grande échelle. C'est le cas de la Ferme de l’Envol, une ancienne base aérienne devenue ferme agro-écologique.  

ferme de lenvol

La ferme de l'Envol

La permaculture fait partie intégrante de l’agroécologie, et elle est définie d’avantage comme une science qu’un modèle agricole. Elle intègre le maintien de la fertilité des sols, sans avoir recours aux produits chimiques, et en limitant l’utilisation d’engins agricoles au maximum. La permaculture repose sur l’association de cultures en elles. 

L’agriculture régénérative est un mode de production qui n’a pas de cahier des charges, ni de label officiel. Mais ses pratiques sont reconnues : elles sont à la croisée du bio et de l’agriculture de conservation des sols. Elle n’utilise aucun pesticide, et évite au maximum de toucher aux sols (via le labour par exemple). C'est le mode de production prôné par la start-up OMIE, qui ne propose que des produits issus de l’agriculture régénérative.  

Si ces modèles agricoles n’ont pas encore de labels reconnus, d’autres labels permettent de mettre en valeur une agriculture encore plus poussée, et parfois considérée comme plus exigeante que le bio. C'est le cas du label “Demeter” qui valorise une agriculture en biodynamie. C’est un mode d’agriculture biologique qui privilégie une plus grande diversité des sols, renforce la santé des plantes, et s’aligne sur le rythme saisonnier.  

Il y a aussi le label “Nature et Progrès”, très pointu sur l'origine des matières premières, et qui impose des critères spécifiques sur la transformation du produit, l'emballage et le transport. Il limite aussi la taille et la densité des élevages. Pour les animaux, la moitié de leur alimentation doit au moins être produite directement sur la ferme.