L'entrepreneuriat : symbole des inégalités hommes-femmes ?

6 mars 2024 | Décryptage L'entrepreneuriat : symbole des inégalités hommes-femmes ?

Où en est l'entrepreneuriat féminin en France ? Quels freins empêchent son développement ? Quelles solutions envisagées ? On fait le point.

En écrivant cet article, on aurait eu presque envie de faire mentir les statistiques. Quand on s’est penchés sur le sujet des inégalités dans l’entrepreneuriat, le verdict ne s’est pas fait attendre : les différences hommes-femmes en termes de création d’entreprises sont très marquées, et la balance penche plutôt en faveur... des hommes. (sans surprise) 

Une étude du Boston Consulting Group (BCG) et de SISTA, 84% des équipes fondatrices de start-up sont masculines, 12% sont mixtes et seulement 5% sont 100% féminines, en 2022.  

Et au sein de ces start-up, seuls 18% des postes de direction sont occupés par des femmes. Où en est l’entrepreneuriat féminin en France ? Quels freins empêchent son développement ? Quelles pistes sont à envisager pour endiguer ces inégalités ? On fait le point. 

Entrepreneuriat au féminin : où en est-on ?  

Globalement, on compte déjà peu de femmes dirigeantes à la tête d’entreprises classiques : selon l’INSEE, seules 4 entreprises sur 10 sont dirigées par des femmes. Mais ces inégalités sont encore plus fortes dans les start-ups et le monde de l'entrepreneuriat. Plusieurs facteurs permettent d’expliquer cette situation. 

Visuel campagne de com sista
Une campagne de communication du collectif SISTA

Un écosystème de financement encore largement dominé par les hommes  

Le principal frein à l’entrepreneuriat féminin, c’est le financement. Les montants des levées de fonds effectuées par des femmes sont en moyenne 4 fois inférieurs aux montants levés par des hommes. 

De plus, les start-ups fondées par des femmes sont 3,4 fois moins valorisées que leurs homologues masculines. 

Selon le collectif SISTA, le problème serait inhérent au système de financement lui-même, qui invisibilise les femmes. 92% des VC partners sont des hommes, et les start-ups dirigées par des femmes ne comptent que pour 7% du montant des levées en France (business angels, plateformes et VC). 

Autre chiffre marquant : parmi les 30 principaux business angels français, on ne compte que 4 femmes.  

 

campagne com willa
La campagne de Willa

Toutefois, dans une étude menée par le cabinet Roland Berger et l’incubateur dédié à l’entrepreneuriat féminin Willa, les difficultés d’accès aux financements sont partagées par les hommes comme par les femmes. (43% des entrepreneurs interrogés, tout comme 40% des entrepreneuses.)  

Les types de financement privilégiés par les femmes  

Si les femmes vont aller chercher plutôt des fonds via des subventions, autofinancements ou du financement participatif, les hommes, eux, vont se tourner en priorité vers les levées de fonds (40% d’hommes contre seulement 17% de femmes).  

Pour pallier ces difficultés d’accès à l’investissement, les entrepreneuses se tournent davantage vers des structures d’accompagnement dédiées. Cet accompagnement permet de limiter les risques de faillite : Le taux de faillite moyen pour une startup non accompagnée est de 40%, et de 20% pour une startup accompagnée. (selon l’étude Roland Berger x Willa) 

Les femmes entreprennent en moyenne 2 fois plus tard que les hommes  

Plusieurs raisons à cela :  

  • Une volonté plus marquée chez les femmes d’acquérir de l’expérience en entreprise avant d’entreprendre : 44% des femmes attendent d’avoir 10 ans d’expérience pour se lancer, alors que les hommes ne sont que 25% à être dans ce cas.  
  • Le déclic entrepreneurial est plus marqué chez les hommes, tandis que les femmes décident de se lancer après un licenciement ou une démission.  
  • 1/3 des femmes choisissent d’entreprendre après avoir eu un enfant.

Si elles entreprennent plus tardivement, c’est aussi parce qu’elles sont en quête de sens. L’étude de Roland Berger et Willa souligne que les femmes entreprennent davantage dans le domaine social et/ou environnemental, tandis que les hommes entreprennent plus dans la finance et la tech. (Les clichés ont la vie dure). Et les motivations pour entreprendre ne sont pas les mêmes : Les femmes ne sont que 6% à déclarer entreprendre dans le but de s’enrichir, ce qui est le cas de 25% des hommes interrogés.” 

Quand les femmes se lancent dans l’entrepreneuriat, les boîtes sont plus rentables  

C’est ce que révèle l’index du Women Equity Partners, sorti en 2021. L’étude a analysé plus de 40 000 entreprises françaises de taille moyenne, et celles dirigées par des femmes sont plus rentables de 32%.  

Pour expliquer cette rentabilité, l’étude rapporte que les femmes éprouvent plus de difficultés à atteindre des postes clés de direction, ce qui les pousserait à avoir de meilleurs résultats que les hommes.  

L’étude souligne également que si les femmes portent une attention particulière à la rentabilité, c'est parce qu’elles ont plus de mal à avoir accès à des financements.

[Vidéo] Et si posait les mêmes questions aux dirigeants de grandes entreprises qu'aux dirigeantes ?

Des pistes pour développer l’entrepreneuriat féminin  

La réglementation actuelle propose des dispositifs et des aides financières pour encourager l’entrepreneuriat féminin. 

Comme la “garantie égalité femmes”, qui facilite l’accès au prêt bancaire ou le prêt d’honneur, accordé sans demande de garantie personnelle, ni intérêts, via l’intermédiaire du réseau Initiative France ou le Réseau Entreprendre. 

Les incubateurs dédiés à l’entrepreneuriat féminin se sont aussi multipliés ces dernières années et offrent la possibilité d’être accompagné dès le début d'un projet. Comme Willa, Sista, ou encore Make Sense. 

Enfin, une des pistes envisagées serait de développer des outils de financement spécifiques, dédiés à l’entrepreneuriat féminin. Sur LITA, nous développons un modèle qui permet aux entrepreneuses et entrepreneurs de financer en direct leurs projets auprès des particuliers.  

Pour les entrepreneuses, cela leur permet aussi de se financer auprès de leur propre communauté, qui peut être plus féminine. C'est un moyen d'instaurer un système d’entraide et de se financer auprès de ses pairs.  

Le financement participatif est particulièrement plébiscité par les femmes, puisque les entrepreneuses y font deux fois plus appel (17%), que les hommes (8%).